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B) Les Guerres de Religion
1) La diffusion du luthéranisme
Martin Luther (1483-1546), un prêtre allemand, est à
l’origine de la Réforme protestante.
La question du rôle des œuvres accomplies par
l’homme dans son salut se posant depuis le V° siècle, Luther se penche sur la
prééminence de la Grâce de Dieu dans le salut. Assistant à la vente des
indulgences papales
qui permet de financer la construction de la basilique Saint-Pierre de Rome, il
s’insurge et envoie ses 95 thèses
contre les indulgences au pape. En réponse, celui-ci lui envoie des théologiens
tels le cardinal Cajetan en 518 et Johann Eck en 1519. Cependant, les idées de
Luther se diffusent rapidement, grâce à l’imprimerie. Luther
va plus loin, en publiant quatre traités théologiques. Le pape lui demande de
se rétracter, mais il refuse. Il est donc excommunié en décembre 1520.
Les Luthériens adoptent la Confession d’Augsbourg en
1530, qui établit trois principes :
-la justification par la foi du fidèle
-le sacerdoce universel, qui implique l’égalité des
chrétiens par le baptême, les rendant tous prêtres
-la Bible, seule autorité.
Ils conservent trois des sept sacrements
catholiques : le baptême, la pénitence et l’eucharistie. Le mariage n’étant plus un sacrement, le divorce
devient possible. La Bible doit être traduite en langue vulgaire, c’est-à-dire dans
la langue nationale, et non en latin, afin que le fidèle puisse avoir accès aux
Écritures. Les saints ne sont en outre pas reconnus par les luthériens.
2) Les hésitations des rois de France…
Bien que le Parlement de
Paris ait imposé une censure sur la publication d’ouvrages à thème religieux
(interdite sans l’accord préalable de la Faculté de Théologie) au début des
années 1520, François Ier s’est en premier lieu montré très tolérant : ainsi
protège-t-il le Cercle de Meaux, composé d’érudits humanistes partisans de
l’évangélisme
qui cherchent notamment à traduire la Bible en langue vulgaire. Après la défaite de Pavie et pendant la
captivité de François Ier en 1525, le Parlement de Paris prend des décisions
plus sévères à l’égard des Protestants.
Malgré un retour à une tolérance lors du retour du
roi, les luthériens français détruisent les images de la Vierge et des Saints,
de nuit, à Paris en 1528. Les catholiques s’imposent des processions
expiatoires, pour obtenir le pardon de Dieu.
En 1534 a lieu l’Affaire des Placards : les protestants
font imprimer un texte, dénonçant la messe catholique qu’ils dénomment
« la messe papale », et les font afficher dans les principales villes
au nord de la France, même jusqu’à la porte de la chambre du roi au château
d’Amboise. Considérant cet acte comme un crime de lèse-majesté, François Ier
soutient la répression visant à exterminer la secte luthérienne. Des autodafés
ont lieu, où on brûle non seulement les livres luthériens mais également leurs
propriétaires. En conséquence, beaucoup de Protestants s’exilent vers le
Saint-Empire, où des princes se sont convertis au luthéranisme, ou en Suisse.
De Genève, Jean Calvin développe des réformes religieuses à partir de 1541. Ses
idées se diffusent notamment en France. Tout comme le luthéranisme, le calvinisme rejette la
Tradition (les écrits des Pères de l’Eglise, comme Saint Augustin, et les principes
imposés par l’Eglise) et ne reconnaissent donc ni la Vierge, ni les Saints. Contrairement
aux luthériens et aux catholiques, l’eucharistie n’est pas
« réactualisée » : le Christ n’est présent que spirituellement
grâce à l’action du Saint-Esprit. Par ailleurs, Calvin impose l’idée d’un
peuple élu et d’une double prédestination : Dieu a déjà choisi, de toute
éternité, les hommes qui seraient sauvés ainsi que ceux qui seraient damnés. Il
développe enfin une structure ecclésiastique non sacrée, un système
presbytéro-synodal :
-à l’échelle locale, le Consistoire composé de
Pasteurs (des hommes capables d’expliquer les Écritures et la doctrine
calviniste aux fidèles), de Diacres (qui collectent de l’argent pour les donner
aux pauvres), des Anciens (dont la fonction est non seulement de faire
fonctionner l’Eglise locale mais également de surveiller les mœurs).
-à l’échelle régionale, le synode provincial,
composé de représentants des Consistoires (généralement un Pasteur et un
Ancien)
-le cas échéant, un synode national, composé lui-même
de représentants des synodes provinciaux.
En 1543, la Faculté de théologie de Paris publie un
texte de 29 articles sur la foi catholique, que François Ier transforme en loi
du royaume. En 1545, à la tête d’une troupe, il écrase la dissidence
« vaudoise » dans le Luberon. Plus d’une centaine de luthériens y
sont pendus.
Henri II (1547-1559) poursuit la politique de son
père François Ier. Il met en place un tribunal à Paris, afin de juger les
hérétiques, qu’on appelle « la Chambre ardente » puisque les
audiences se tenaient dans une pièce sombre, éclairée par des bougies ou des
torches, et les condamnés sont brûlés. L’édit de Châteaubriant (1551) contrôle et
censure la production de l’imprimé. L’Eglise catholique tend à se réformer
pendant le Concile de Trente (1545-1563). Le roi se charge de faire diffuser
les décisions du concile.
Malgré ces mesures sévères, le calvinisme se
développe. Le 13 mai 1558, les protestants se rassemblent au Pré-aux-Clercs à
Paris pour chanter des psaumes. On y retrouve notamment des nobles, dont des
princes du sang comme Louis de Bourbon, prince de Condé, et Antoine de Bourbon,
roi de Navarre, convertis à la foi protestante. On estime à cette époque 2
millions de Protestants sur 20 millions d’habitants en France (soit 1/10 de la
population).
Les Protestants projettent d’enlever le roi François
II (1559-1560). Mais leur complot est rapidement découvert et le roi, se
trouvant au château de Blois, se réfugie à Amboise. De là, il ordonne
l’arrestation des nobles protestants prenant part au complot. Il fait exécuter
La Renaudie, chargé d’enlever le roi et la reine, ainsi que les principaux
conspirateurs. Il amnistie les autres nobles, dont le prince de Condé.
François II se rapproche de sa mère Catherine de
Médicis, cherchant la conciliation. Il promulgue l’édit d’Amboise, amnistiant
les conspirateurs protestants, ouvre la voie vers la liberté de conscience, et
nomme Michel de l’Hôpital, favorable à une politique de conciliation,
chancelier. Cependant, François meurt à la fin de l’année 1560. Son frère
Charles IX, âgé de dix ans, devient roi. Catherine de Médicis, régente pendant
la minorité de Charles IX, poursuit cette politique d’entente entre catholiques
et calvinistes. Mais le colloque de Poissy (1561) réunissant les deux
confessions est un échec et les tensions s’accentuent. Un édit de tolérance
autorise le culte protestant à partir de janvier 1562.
3) … menant à des conflits sanglants
Malgré cette politique de tolérance, le premier
massacre de protestants perpétré par des catholiques a lieu à Vassy le 1er
mars 1562. La Première Guerre de Religion commence : les Protestants,
soutenus par la monarchie anglaise, combattent les Catholiques, assistés par la
monarchie espagnole. Ils cherchent à s’emparer des villes. Lors du siège
d’Orléans, le 18 février 1563, le duc de Guise, catholique, est assassiné par
un protestant. Charles IX parvient à imposer une paix le 19 mars 1563.
Le prince de Condé organise une nouvelle
conspiration, ce qu’on appelle la Surprise de Meaux en 1567 afin d’enlever le
roi. Charles IX se réfugie à Paris, mais une nouvelle guerre civile éclate. Le
30 mai, la Michelade a lieu à Nîmes : un massacre de 90 catholiques
(notamment des clercs) par des protestants. Une paix brève est signée le 23
mars 1568, mais elle se termine en août de la même année. Lors de la Bataille
de Jarnac, le 13 mars 1569, le Prince de Condé est assassiné à son tour par un
catholique. La paix revient le 8 août 1570. Charles IX accorde aux protestants
des places de sûreté (par exemple, Le Port de La Rochelle, Montauban, etc.) Catherine
de Médicis organise un mariage entre Marguerite de Valois et Henri de Navarre,
protestant, célébré le 18 août 1572.
L’amiral protestant Gaspard II de Coligny cherche
toutefois à faire intervenir la France dans les Pays-Bas espagnols afin
d’affaiblir le roi d’Espagne Philippe II. Les tensions entre les deux partis
s’accentuent à nouveau. Le 22 août, L’amiral de Coligny est blessé au bras par
une balle d’arquebuse, victime d’un attentat. Se sentant menacé, le roi, lui
promettant d’abord de pourchasser le criminel, décide finalement d’éliminer les
chefs protestants. Cette décision dérive en un massacre de milliers de protestants,
perpétré par les catholiques dans la nuit du 23 au 24 août.
Le 26 août, le roi endosse la responsabilité de l’exécution
des chefs protestants.
Les affrontements reprennent, se terminant le 11
août 1573, mais reprenant moins d’un an plus tard. Le 30 mai 1574, Charles IX
meurt malade. Son frère Henri III (1574-1589) lui succède. Un tiers parti se
forme, entre les catholiques et les protestants : les
« Malcontents », dirigés par le dernier frère du roi, François
d’Alençon (duc d’Anjou), partisans d’une entente avec les réformés. Après la
cinquième guerre de religion (1574-1576), une paix est signée entre les
différents camps. A l’image de l’Organisation du Midi créé par les protestants,
les catholiques fondent la Ligue de Péronne avec pour chef le duc de Guise,
puis Henri III lui-même. Deux nouvelles guerres ont lieu à la fin des années
1570.
Le roi fonde l’Ordre du Saint-Esprit le 31 décembre
1578, premier ordre de la France et dont les grands-maîtres sont les monarques.
Le dernier frère du roi meurt toutefois en 1584. Celui-ci
n’ayant pas d’enfant, François d’Alençon était en effet censé lui succéder. Se
pose le problème de la succession : le plus proche héritier est Henri de
Navarre. Or, ce dernier est protestant. Les Ligueurs ne veulent pas le
reconnaître et traitent avec le roi d’Espagne afin que celui-ci finance leur
armée. Le 30 mars 1585, ils publient le manifeste de Péronne, expliquant
qu’un protestant ne peut revendiquer la couronne du royaume de France. Henri
III finit par céder en signant l’édit de Nemours le 18 juillet, excluant les
protestants des droits à la couronne.
La Huitième Guerre de Religion débute en 1585. Celle-ci,
bien plus longue que les précédentes, ne se finit qu’en 1598. La situation
échappe au roi, ayant perdu tout soutien. Le duc de Guise est reconnu par la
Ligue comme le sauveur de la foi catholique. Henri III tente maladroitement
d’interdire son entrée triomphale à Paris, en avril 1588. Le duc de Guise y
parvient toutefois. Les Parisiens se révoltent contre le roi le 12 mai 1588,
forçant ce dernier à quitter la capitale. Otage de la Ligue, il se soumet à
leurs requêtes. Il signe donc l’édit d’Union le 15 juillet, confirmant qu’un
protestant ne peut accéder à la couronne de France.
Le 23 décembre 1588, Henri III convoque le duc de
Guise dans ses appartements. Une fois entré, les gardes se jettent sur le duc
et le tuent. Le lendemain, le roi ordonne l’exécution de ses frères, dont le
cardinal de Lorraine. Chez les catholiques, le duc de Guise et son frère sont
perçus comme des martyrs. Ils ne reconnaissent plus Henri III comme leur roi,
l’appelant « Henri de Valois », « le tyran ».
Par conséquent Henri III s’allie avec les
protestants, donc avec Henri de Navarre, contre la Ligue catholique. Leurs
armées encerclent Paris à partir de l’été 1589. Mais Henri III est assassiné à
Saint-Cloud, dans sa tente, par le moine Jacques Clément, le 1er
août. Ce dernier est tué par les gardes, puis son corps est écartelé post-mortem.
Avant sa mort, Henri III lègue le royaume à Henri de
Navarre, devenant Henri IV, alors que les Ligueurs reconnaissent le cardinal de
Bourbon comme leur roi, sous le nom de Charles X.
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